Anne-Elise Averty, assistante « couteau-suisse », Averty Solutions pour entreprises

Portraits écrits

Interview d'entrepreneur·euse

Il ne faut pas hésiter à dire ce qu’on fait. Même si la personne n’est pas intéressée tout de suite, une petite graine germe

Anne-Elise
Anne-Elise

Interview

Bonjour Anne-Elise. Peux-tu te présenter en quelques mots ?

Bonjour, je suis Anne-Elise Averty. J’ai 34 ans, je suis originaire de Rennes et je vis à Paris. J’ai commencé à travailler assez jeune. J’ai eu mon bac scientifique à 18 ans.

J’ai un CAP en tapisserie d’ameublement. C’est quelque chose qui me tenait vraiment à cœur. Mais mes parents n’étaient pas convaincus par un métier manuel, pour trouver une place. J’ai fait 6 mois en chantier naval. Un univers assez rude. 6 filles pour 250 garçons à peu près. De fil en aiguille, j’ai décroché de la tapisserie, ça fait partie des secteurs qui se perdent un peu.

Je me suis tournée vers l’assistanat, d’abord en tant que chargée de clientèle pour un golf. J’ai passé un BTS en comptabilité. Aujourd’hui, je fais du conseil et de l’assistance en gestion administrative et organisationnelle. J’ai monté une SAS (Société par Actions Simplifiées), Averty Solution. Ça fait 1 an et demi maintenant que je suis à mon compte.

Dans ton parcours, à quel moment t’est venue l’envie d’entreprendre ?

J’ai toujours été salariée. J’ai notamment été en CDI à Rennes, dans un groupe où j’avais la chance de faire à la fois de la comptabilité clients et fournisseurs (en général, c’est l’un ou l’autre). Mais je m’ennuyais et je sentais que j’avais plus de choses à donner à l’entreprise. J’ai cumulé des compétences qui peuvent servir à autre chose que de la comptabilité ! Dans mon parcours, j’ai passé 2 ans et demi au Canada. C’est vrai que ça a changé ma philosophie de la vie professionnelle. Là-bas, on m’a donné ma chance. Plus je montrais mes capacités, plus on me donnait des tâches compliquées.

Lorsque sur un plan personnel j’ai rencontré quelqu’un qui habitait Paris, là, je me suis dit que professionnellement, j’aurais plus de chance de me lancer là-bas. Et peut-être à mon compte. J’y réfléchissais déjà.

Quel a été ton déclic ?

Le cap que j’ai voulu passer, c’est décloisonner mes compétences. Je me suis rendue compte qu’il y avait de l’emploi sur Paris en tant que comptable, mais je me disais :

Ce n’est pas là-dedans que tu vas t’épanouir.

J’avais envie d’aider grâce à ma gestion, la façon dont je voyais les choses.

J’ai demandé une rupture conventionnelle et j’ai été au chômage pendant 1 an. J’ai mis 1 an pour créer mon entreprise. Cette année-là m’a permis de poser les choses, savoir ce que je voulais faire, proposer à mes clients. Je voulais toucher à tout, je suis un vrai couteau suisse.

Je suis partie sur un statut juridique d’entreprise directement, en SAS (Société par Actions Simplifiée). Car je voulais me mettre un objectif dans ma tête, pour aller au charbon et me donner les moyens. Je savais que ça allait me coûter 1 000 € en charges à l’année si je ne trouvais pas de clients. J’étais prête à les perdre. Au moins, j’aurais essayé. Je suis quelqu’un d’assez pragmatique.

Qu’est-ce qui t’a permis de te lancer ?

J’ai été accompagnée par l’ADIE (Association pour le Droit à l’Initiative Economique), pendant 15 jours. Ce sont des bénévoles (salariés, chefs d’entreprise venant de secteurs différents) qui ont de l’expérience : ils donnent des outils, des tableaux, une base de travail.

J’étais dans un groupe de 10 personnes avec beaucoup de bienveillance, d’entraide, de soutien. On réfléchit tous ensemble sur les projets de chacun. Le dernier jour, on fait une vraie présentation de son projet devant un jury. On se rend compte que tout le travail des 15 jours sert à peaufiner, mettre les idées au clair. On arrive avec quelque chose de très brouillon, et on ressort avec quelque chose de bien clair.

C’est cette base qui m’a permis de trouver ma légitimité par rapport à ce que je fais aujourd’hui. En fait, moi je voulais tout faire en même temps. Je disais tout ce que je suis capable de faire, je voulais me vendre pour tout. En 2 minutes, quand on présente ça à quelqu’un, on perd son attention. Je me suis rendue compte qu’il fallait d’abord entrer par une petite porte pour ensuite faire évoluer les choses. Mon entrée : c’est l’assistanat, la comptabilité.

Quels sont les principaux obstacles que tu as rencontrés dans la création de ton projet ?

Passer le cap du 1er client. Une fois qu’on a passé ce cap-là, c’est plus facile d’aller voir un 2ème, un 3ème… Ça fait le déblocage dans la tête :

Il y a un client qui me fait confiance, pourquoi pas un 2ème ?

Quand je me suis lancée en février 2020, on est tombé en confinement 3 semaines après. Je n’avais pas prospecté encore. Je dramatisais vraiment la situation en me disant que personne ne voudrait prendre quelqu’un comme ça. J’ai payé une annonce sur Google, je me suis dit :

Je tente le tout pour le tout.

Cette annonce a déclenché mon 1er client. Et ensuite, ça a fonctionné par le bouche-à-oreille. Mais quand j’ai rencontré mon 1er client, j’étais inquiète, je me disais :

S’il ne me prend pas, je vais devoir penser à fermer la société et retourner vers le salariat.

Je crois que tu as eu l’occasion de te faire coacher ?

Oui, le Président d’une association dont je suis trésorière est coach. J’ai fait une séance de coaching pour m’aider à peaufiner mon offre de service. La légitimité, c’est ça qu’on a travaillé avec le coach. Se dire : voilà ce que j’ai fait, comment je l’ai fait. Quand on met ça sur un papier, on se rend compte de ce qu’on a été capable de faire et ça prend du sens tout ça.

C’est une prise de conscience sur son propre parcours. Je me suis rendue compte que les choses négatives qui m’étaient arrivée et qui m’avaient pesée, je n’y pouvais rien. Au contraire, les choses positives étaient de mon fait. Ça a déclenché les choses dans mon esprit : les malheurs on les subit, mais il faut savoir rebondir ! Il y a une oscillation de la courbe. J’étais plutôt fière de moi. J’ai trouvé ça très positif.

Et aujourd’hui, ton entreprise marche ?

J’ai réussi à démarrer. Là, je suis contente, tout se passe bien.

La réussite va se calculer sur le long terme. Réussir, c’est obtenir les objectifs que l’on s’est fixés. Je les ai atteints aujourd’hui : j’ai un temps plein avec des clients et des activités variées. J’en vis beaucoup mieux qu’en étant salariée. Je vais mieux m’y retrouver.

Pour finir, as-tu un bon plan à partager ?

Les lundis Paradis, un  événement mensuel destiné à favoriser le networking entre Femmes Entrepreneures. C’est gratuit, sympa. Ça permet de rencontrer du monde de manière informelle. Avant, ça se faisait rue de Paradis (Paris, 10ème arrondissement), en partenariat avec le bar Post-Paradis. Quand on a un verre à la main, on se sent plus décontracté, on parle plus facilement ! Aujourd’hui, ça continue avec Zoom.

Et je conseille aussi un petit livre de poche « Le manuel moderne de la Working girl – Toutes les clés pour booster et réussir votre carrière », de Otegha Uwagba.

Des conseils à celles qui ont envie de se lancer ?

  1. Ne pas hésiter à dire ce qu’on fait. Même si la personne n’est pas intéressée tout de suite, une petite graine germe.
  2. Toujours avoir sur soi une carte de visite ou, en tous cas, de quoi laisser une trace.
  3. S’entraîner vraiment à pitcher, même avec des amis. Se présenter rapidement et synthétiquement. Ecrire et apprendre par cœur un petit texte de quelques lignes. Pour avoir son discours bien rodé, pour se concentrer vraiment sur le client et son besoin – et pas sur le fait de savoir si on lui a dit tout ce qu’on voulait, si on n’a rien oublié !
  4. Ne pas se sous-vendre sous prétexte qu’Untel est moins cher. Quand on vend un produit, le prix se calcule beaucoup plus simplement. Quand on vend ses services, c’est ‘Combien ça coûte 1 heure de mon temps de travail ?’. Faut tenter plutôt la fourchette haute, si le client veut négocier, il négociera toujours. Il y a le prix du marché, OK. Mais on vend aussi une expérience personnelle, ses compétences. Après, il n’y a que l’expérience pour voir si on s’est planté dans les tarifs.

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