Juli(e), guerrière de porcelaine

Portraits écrits

Histoire de vie

J’ai passé pas mal de temps à explorer la matière. Au départ, j’avais des difficultés à me dire engagée (…) Désormais, je commence à assumer mon travail autour du morcèlement du corps. Comme l’appropriation d’une certaine féminité

Juli(e)

Timide et angoissée. De celles dont la fragilité se lit et se livre d’emblée.

Dans un regard détourné cherchant à fuir une réalité qui se fissure…. craquelle, sous le poids d’évènements trop lourds à porter.

A travers l’infinie délicatesse d’une main tendue pour rattraper ce temps perdu à ne pas se sentir aimée. Respectée, protégée.

Môme, elle rêve de théâtre pour échapper à un parcours de vie compliqué. Chaotique. Incertain. Mal engagé.

Depuis toujours en déséquilibre, elle marche sur le fil de ses fêlures. Sans filet. Funambule agile. Sans cesse en bascule. Mais jamais tombée.

Elle ne sait quoi faire de ce corps. Enveloppe charnelle impossible à déserter. Carapace la renvoyant inlassablement à sa féminité.

Encombrante, pesante. Attirant malgré elle les intentions douteuses. Les regards appuyés. Elle se sent exilée du dedans. De l’intérieur, morcelée.

Jusqu’au jour de sa rencontre avec elle, la porcelaine papier. Blanche, nue, vierge. Epurée. Offrant de la plasticité.

A l’opposé de sa propre monstruosité. Supposée. Imaginée. Construite au fil des années pour éviter toute intimité.  

Révélation bouleversante. Porte ouverte d’une réconciliation avec sa vulnérabilité. Julie renoue avec son corps à force d’explorer. Métamorphosée.

Minutieuse, précise. Elle prend soin. Commençant ainsi à réparer les morceaux brisés. Les fragments de soi. Pratique cathartique pour retraverser en douceur sa sensibilité.

Par-delà ses blessures, dépasser ses peurs. Presque plus cadenassée. Faire avec cette fragilité inhérente. Incrustée. L’apprivoiser.

Faire corps avec la porcelaine pour pouvoir se le réapproprier. Ce corps libéré. Savoir l’envisager autrement. Lui donner enfin la priorité.  

Se départir du E pour se défaire d’EUX. Fantômes envahissants, dévorants. Absorbant jusqu’alors son identité. Renaître à la vie. Avec envie. Et juste un I. Ode à sa singularité.  

Julie, désormais rassurée. Juli peut manifestement s’engager.